Ce dimanche 2 novembre 2025, au petit matin noyé dans la pluie et la brume de Saint-Laurent-du-Pont, la traileuse haut-savoyarde Sonia Poutrel a écrit une page de légende du trail français.
Sonia Poutrel – Une victoire historique dans la boue et la brume
Après 47 heures de course ininterrompue et 315 kilomètres avalés, elle devient la première femme à remporter la Chartreuse Backyard Ultra, épreuve d’endurance réputée pour briser les corps et les esprits.
L’édition 2025 restera gravée dans les mémoires. Pas seulement pour ses conditions météos apocalyptiques.
Mais pour le symbole qu’elle représente : une femme seule, debout, victorieuse, dans une course où il ne peut en rester qu’un.
Le principe infernal de la « Backyard Ultra »
Pour ceux qui ne connaissent pas encore le concept, la « backyard ultra » est un jeu d’endurance impitoyable inventé aux États-Unis.
Le principe est simple… en théorie : chaque heure, les coureurs doivent boucler une boucle de 6,706 km. Ni plus, ni moins.
Ceux qui n’ont pas terminé dans le temps imparti sont éliminés. Et les survivants repartent à l’heure suivante, encore et encore, jusqu’à ce qu’il ne reste qu’un seul coureur en piste.
Cette mécanique cruelle transforme la course en duel mental. Le corps lâche bien avant la tête, mais dans une Backyard, c’est la volonté qui décide de tout.
Une édition dantesque en Chartreuse
Le départ a été donné à midi, le vendredi 31 octobre, sous un ciel déjà menaçant.
306 participants s’élancent alors sur les sentiers humides de Chartreuse, avec en tête l’idée folle d’aller “aussi loin que possible”.
Les premières 24 heures ressemblent à une marche ordonnée vers la folie : les boucles s’enchaînent, les visages se ferment, les yeux se creusent.
Puis la nuit tombe, apportant la pluie. Des trombes d’eau s’abattent sur le massif, transformant les chemins en rivières de boue.
À deux heures du matin le dimanche, il ne reste plus que deux irréductibles : Sonia Poutrel et Anthony Fauvi, le coureur villeurbannais habitué des ultra-trails.
Ils entament alors leur 40ᵉ tour, trempés, transis, mais toujours lucides.

Sonia Poutrel – Le duel final sous la pluie
Les deux derniers compétiteurs avancent ensemble, solidaires dans la souffrance, comme souvent dans ces courses où la rivalité se transforme en camaraderie.
Mais à la 46ᵉ boucle, un détail fatidique fait basculer le destin. Anthony Fauvi repart sans sa montre.
Son assistante lui court après pour la lui remettre — un geste d’humanité, mais interdit par le règlement dès que la ligne de départ est franchie.
La sanction tombe. Disqualification immédiate. Sonia Poutrel devient alors, par la force du règlement et de sa ténacité, la dernière encore debout. 47 tours bouclés.
47 heures de résistance pure. Et une victoire à la fois méritée, symbolique et historique.
« Promouvoir le sport au féminin »
Sonia Poutrel ne cachait pas son émotion à l’arrivée. Tremblante, épuisée, mais souriante, elle confie :
« C’était un objectif pour moi, en remportant cette Backyard, de promouvoir le sport au féminin. »
Une déclaration simple, mais puissante. D’autant plus impressionnante quand on connaît le parcours de la Haute-Savoyarde : asthmatique, sujette à des problèmes articulaires.
Elle n’a jamais laissé son corps lui dicter ses limites. En 2025, elle avait déjà enchaîné sept courses de l’UTMB World Series, dont plusieurs ultra-trails de plus de 100 km.
Un programme déjà fou, complété par cette victoire surhumaine en Isère.
Une performance hors norme
315 kilomètres.
47 boucles.
47 départs, 47 arrivées.
Et des centaines de micro-victoires arrachées à chaque pas.
Dans une Backyard Ultra, on ne court pas contre les autres. On court contre soi. Contre le sommeil, la douleur, la pluie, le froid.
Chaque heure, il faut se relever, remettre ses chaussures trempées, affronter la boucle suivante. Et recommencer. Encore et encore.
Sonia Poutrel l’a fait, sans jamais plier. Et c’est peut-être là, plus que dans le chrono ou la distance, que réside la beauté de cette victoire : dans la constance, la résilience et la foi en soi.
Sonia Poutrel – Un message fort pour toutes les sportives
Dans un monde du trail encore largement masculin, cette victoire fait figure de symbole.
Sonia Poutrel n’a pas seulement gagné une course. Elle a prouvé que les femmes pouvaient aller aussi loin, aussi longtemps, et parfois plus encore.
Son exploit dépasse les frontières du sport. Il inspire, motive, et redéfinit la notion même de performance.
Son sourire au petit matin, devant les montagnes de Chartreuse noyées de brouillard, en dit long : la victoire n’est pas seulement une question de muscles, mais de mental.

Une édition déjà mythique
L’organisation, menée par l’équipe de la Chartreuse Backyard, n’a pas caché son admiration.
Malgré des conditions dantesques, les bénévoles ont tenu le camp de base éveillé pendant deux jours et deux nuits.
Les spectateurs, eux, ont assisté à une véritable leçon d’endurance et d’humanité.
Cette 2025 restera comme l’édition du courage, celle où une traileuse venue de Haute-Savoie a défié les éléments, les règles du sommeil et les limites du corps humain pour écrire une page d’histoire.
Conclusion – Sonia Poutrel, à jamais la première
En remportant la Chartreuse Backyard, Sonia Poutrel devient la première femme à inscrire son nom sur le palmarès de cette course démente.
Mais plus encore, elle devient un symbole de persévérance et d’égalité sportive.
Son histoire rappelle que, dans le trail comme dans la vie, la victoire n’appartient pas à ceux qui courent le plus vite, mais à ceux qui refusent d’abandonner.
Et cette fois, sous la pluie de Chartreuse, c’est une femme qui est restée debout la dernière.
Bien s’équiper pour le sport