Dans le monde du trail, peu de noms résonnent autant que celui d’Anton Krupicka.
Coureur américain à la barbe légendaire, torse nu sur les sentiers des Rocheuses, il incarne à lui seul une philosophie : celle du retour à l’essentiel.
Minimaliste, mystique, poète du mouvement, il a redéfini ce que signifie courir libre.
Anton Krupicka – Interview à Chamonix – Août 2025
Anton Krupicka – Des débuts précoces et prometteurs
Anton Krupicka naît en 1983 à Niobrara, dans le Nebraska. Un coin reculé des États-Unis où les grands espaces façonnent déjà son rapport à la nature.
Il découvre la course très tôt. À 11 ans, il avale déjà des kilomètres avec une aisance étonnante. Un an plus tard, il boucle son premier marathon. À 12 ans seulement. Une performance qui annonce la suite.
Jeune adulte, il étudie les mathématiques et la philosophie à l’université. Deux domaines qui, à bien y regarder, ne sont pas si éloignés du trail : logique, réflexion, et quête de sens.
Mais très vite, la montagne prend le dessus. Krupicka quitte les bancs de la fac pour les sentiers. Et la légende commence.

L’émergence d’un phénomène du trail
Les années 2000 marquent son envol. En 2006, il explose sur la scène internationale en remportant la Leadville Trail 100, l’une des courses les plus mythiques des États-Unis.
Il récidive l’année suivante, s’imposant à nouveau sur les 160 kilomètres et 4 800 mètres de dénivelé de cette épreuve d’altitude.
Son style tranche radicalement avec celui des coureurs classiques.
Pas de montre GPS. Absence de flasque dernier cri. Pas même de tee-shirt. Juste un short, une paire de chaussures minimalistes et une envie brute de courir.
Il enchaîne les performances :
- Victoire à la Miwok 100K.
- Succès sur la Rocky Raccoon 100.
- Record du parcours au White River 50 Miler.
Partout, son allure sauvage séduit. Les médias le surnomment “The Barefoot Prophet”, le prophète pieds nus. Un coureur libre, en marge du système.
Un minimaliste avant l’heure
Bien avant que le “barefoot running” ne devienne une tendance, Krupicka en faisait déjà son credo.
Pour lui, la course est un acte de dépouillement. Un retour à la pureté du geste. Il court souvent torse nu, avec une simple ceinture de ravitaillement et des chaussures ultra-légères.
Sa barbe, sa crinière blonde et son allure d’ermite moderne ont marqué toute une génération de coureurs.
Mais le minimalisme d’Anton n’est pas une posture. C’est une philosophie de vie.
Il prône une approche respectueuse du corps, une connexion directe avec la nature et une recherche d’équilibre entre performance et contemplation.
Dans une ère dominée par les records et la technologie, il rappelle que la course est avant tout une expérience intérieure.
Les blessures, tournant d’une vie
Mais cette recherche d’absolu a un prix.
En 2011, Krupicka se fracture la jambe. Puis les blessures s’enchaînent : périostites, tendinites, douleurs chroniques aux tibias et au tendon d’Achille. Le corps dit stop.
Ce passage à vide devient pourtant un nouveau point de départ. Plutôt que de s’acharner, il choisit de se réinventer. Il découvre le vélo, le ski de randonnée et l’escalade.
Son rapport à la montagne évolue : moins centré sur la performance, plus orienté vers l’aventure et la liberté.
Aujourd’hui, Anton se décrit comme un “mountain athlete” plutôt qu’un simple coureur.
Il enchaîne les projets outdoor, enchaînant ascensions et longues traversées alpines. Son objectif ? Explorer la montagne sous toutes ses formes.
Anton Krupicka – Un style de vie à contre-courant
Anton Krupicka vit à Boulder, Colorado, mais son véritable foyer reste la montagne. Il voyage léger, souvent seul, alternant entre van life et bivouacs improvisés.
Il privilégie les longues sorties en pleine nature, loin des foules et des podiums.
Sa philosophie attire autant qu’elle intrigue. Il inspire toute une génération de coureurs en quête de sens et de simplicité.
Pour beaucoup, il représente le refus du conformisme. Un coureur qui préfère vivre son sport plutôt que de le performer.
Dans ses interviews, il parle souvent de “flow”, cet état de fluidité totale où le corps et l’esprit ne font plus qu’un. C’est là, dit-il, que réside la vraie magie du trail.
Retour en force et actualité récente
Après plusieurs années de relative discrétion, Krupicka fait un retour remarqué.
En 2024, il termine 2ᵉ du Grindstone Trail Running Festival by UTMB (100 miles).
Une performance exceptionnelle qui lui ouvre la porte de la finale UTMB 2025 (qu’il ne cours pas à cause d’une blessure).
Son approche du sport a aussi évolué. Plus mature, plus apaisé, il mise désormais sur la durabilité : moins de volume, plus de régularité, et un travail de fond sur la récupération.
Il parle ouvertement de ses blessures, de ses doutes et de sa gratitude envers la communauté du trail. Une transparence qui renforce encore sa popularité.
Le symbole d’un retour à l’essentiel
Anton, c’est bien plus qu’un athlète. C’est un symbole.
Celui d’une course déconnectée du superflu. D’un mouvement qui replace la nature, la lenteur et la sincérité au centre de la performance.
Pour lui, chaque foulée raconte une histoire. Celle d’un homme qui court non pas pour gagner, mais pour se trouver.
Et à l’heure où l’ultra-trail se professionnalise, Anton Krupicka demeure une figure rare : un coureur libre, habité, intemporel.
Barbe au vent, corps affûté et regard tranquille, Anton Krupicka continue d’inspirer le monde du trail.
Il ne court plus pour battre des records, mais pour vivre.
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